18.06.2015

Émigration – Mot du jour

Grâce aux progrès dans toutes les formes de communication et à la facilité des déplacements, les gens ont aujourd’hui la possibilité d’être plus mobiles que jamais. Suite aux récentes remarques de certains hommes politiques et aux gros titres de certains médias concernant le changement d’identité de l’Europe et de ce que signifie être « européen », il convient de s’intéresser à l’un des termes centraux de ce débat : émigration.

Défini comme le fait de quitter son pays pour aller s’établir dans un autre, le mot émigration vient du bas latin emigrationem composé du préfixe ex (hors de) et du verbe migrare (s’en aller). Malgré cette définition, les locuteurs (débutants ou expérimentés) se posent parfois la question de savoir quand utiliser ce mot et quand utiliser « immigration ». Pour illustrer leur emploi, prenons l’exemple de la famine de la pomme de terre qui a touché l’Irlande au milieu du XIXe siècle. Quand un Irlandais décidait de quitter son pays d’origine, on l’appelait un émigrant. Mais lorsqu’il arrivait dans un autre pays pour s’y installer, comme le Royaume-Uni, les États-Unis ou encore l’Australie, il devenait un immigrant.

Cela étant dit, concernant l’Europe, ou toute autre zone géographique, en quoi ce mot pose-t-il potentiellement problème ? Compte tenu de la faiblesse du taux de fécondité en Europe et de l’augmentation des niveaux de migration entrante, certains craignent que les émigrants venus d’autres continents modifient ce que représente le fait d’être européen en essayant d’appliquer une diversité culturelle à un système européen qui accorde déjà une grande importance à ses propres valeurs et cultures. Par ailleurs, l’ouverture des opportunités de déplacement et la richesse émergente et les conflits civils dans les pays en développement contribuent à augmenter ce désir d’émigrer vers l’Europe. Au-delà d’une interprétation strictement culturelle, la question de l’espace disponible et de l’hébergement se pose, notamment dans des pays de petite taille ou densément peuplés, comme le Royaume-Uni. En effet, y a-t-il suffisamment d’espace habitable pour répondre aux besoins de tout le monde ? De ce fait, certaines organisations, comme le Parti pour l’indépendance du Royaume-Uni (UK Independence Party), ont proposé de limiter le nombre d’émigrants venus d’UE et d’ailleurs.

Apparu en langue anglaise dans les années 1640, le terme emigration a été utilisé pour la première fois par l’Évêque Joseph Hall dans son livre pieux The Balme of Gilead. Bien qu’initialement utilisé dans un contexte religieux, ce terme ne tarda pas à prendre un sens dans le domaine des sciences sociales. En effet, en 1676, Sir Matthew Hale expliquait dans The Primitives Origination of Mankind que : « l’excès a souvent conduit aux émigrations ». Thomas Newte a été le premier auteur connu à parler de l’émigration dans le sens que nous lui donnons aujourd’hui (à savoir quitter un pays particulier) dans Prospects on a tour in England and Scotland (1791) où il mentionnait : « ces émigrations mélancoliques des îles d’Écosse ».